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Nov
01

Comment éviter les courbatures?

Comment éviter les courbatures? par Guy Thibault

Les adeptes du ski de fond perçoivent généralement la sensation de fatigue engendrée par une séance d’entraînement comme quelque chose d’agréable : c’est une  » saine  » fatigue puisqu’elle disparaît rapidement. Suffisamment en tout cas pour qu’on soit en mesure de faire la prochaine sortie — le lendemain ou le surlendemain — frais et dispos. Par contre, quoi de plus désagréable que les courbatures ?

La courbatureLa courbature est une douleur musculaire particulièrement vive qui se développe avec un certain délai après un exercice pour lequel on n’était pas parfaitement préparé. Cette douleur est à son plus haut point 24 à 48 heures après l’effort, s’amenuise par la suite puis disparaît, normalement après une semaine. On la ressent au repos, mais c’est surtout lorsqu’on fait une pression sur le muscle, lorsqu’on le contracte ou lorsqu’on l’étire que la douleur est la plus intense.

Pour plusieurs personnes, en début de saison, les courbatures constituent une source de découragement. Il faut par contre savoir qu’un exercice auquel on est habitué ne provoque pas de courbatures. D’ailleurs, c’est précisément pour réduire autant que possible les risques de courbatures qu’un bon programme d’entraînement comprend une phase d’initiation où le stimulus d’entraînement est plutôt faible, puis augmente progressivement et lentement avant d’atteindre un niveau optimal.

Toute activité à laquelle on n’est pas adéquatement préparé peut provoquer des courbatures. Ainsi, même le skieur d’expérience peut risquer d’en avoir au lendemain d’un entraînement au cours duquel il [elle] aura pratiqué un nouveau mouvement ou après une compétition particulièrement longue.

Certaines formes d’exercice présentent manifestement un plus grand risque de courbatures. Ce sont les activités qui occasionnent des contractions musculaires excentriques [voir encadré].

Trois types de contraction musculaireContraction musculaire statique ou isométrique : le muscle ne change pas de longueur.

Par exemple : tenir un poids à bout de bras, sans bouger.

Contraction musculaire concentrique : le muscle se raccourcit.

Par exemple : la contraction des muscles dorsaux lors de la phase de propulsion en style classique.

Contraction musculaire excentrique : le muscle s’allonge.

Par exemple : la contraction des quadriceps lors de la phase de mise en charge précédant la poussée en pas du patineur.

On peut en prendre conscience en faisant un exercice consistant à monter sur un banc et à en redescendre pendant quelques minutes en utilisant toujours la même jambe pour monter et l’autre pour redescendre. Dans ce cas, il y aura beaucoup plus de contractions excentriques dans la jambe utilisée pour redescendre [les muscles se contractent en s’allongeant lors de la réception] que dans celle utilisée pour la montée [les muscles se contractent en se raccourcissant lors de la montée sur le banc]. Immanquablement, c’est à la jambe dont les muscles auront effectué le plus de contractions excentriques que se feront sentir les courbatures.

D’ailleurs, si vous avez déjà fait des randonnées pédestres en montagne, vous avez sans doute constaté que la montée est exigeante du point de vue cardio-vasculaire [comme en témoigne l’essoufflement ressenti], mais la descente est plus douloureuse. En effet, lors de la descente, les muscles de la marche doivent se contracter de manière excentrique pour amortir le poids du corps à chaque pas.

On ne connaît pas encore tous les phénomènes occasionnant les courbatures. Cependant, une chose semble claire : elles ne sont pas dues comme plusieurs le croient à l’acide lactique [voir encadré].

L’acide lactique a le dos large On entend couramment des personnes actives incriminer l’acide lactique — une substance produite par les cellules musculaires lorsqu’elles travaillent à haut régime — pour expliquer leur fatigue et leurs courbatures le lendemain d’un effort assez ardu. Or, l’acide lactique ne peut être tenu responsable des dommages infligés aux fibres musculaires et à leur  » charpente « , ni donc des courbatures, car les contractions musculaires de type excentrique — dont on sait qu’elles sont celles qui occasionnent le plus de courbatures — ne s’accompagnent à peu près pas de production d’acide lactique. Faute de preuve, il faut  » acquitter  » l’acide lactique.

Il apparaît assez évident que le mécanisme puisse être différent selon le type d’exercice effectué [sa durée, son intensité, etc.] et que la principale cause de la douleur soit l’inflammation qui s’installe dans le muscle suite à son usage trop intense ou trop prolongé. Il semble que la réaction inflammatoire dans les muscles soit déclenchée par un dommage occasionné par l’exercice dans la structure de soutien des cellules musculaires.

Ces structures de soutien, qu’on appelle les fibres collagènes, transmettent le long du muscle les forces développées par les fibres musculaires. Elles sont soumises à des tensions élevées et donc peuvent parfois être endommagées. Lors d’une contraction musculaire excentrique, la tension dans chaque fibre musculaire active peut être plus élevée que lors d’une contraction concentrique : pour une tension donnée, un moins grand nombre de cellules musculaires sont mises en action si la contraction est excentrique, si bien que chaque fibre est soumise à un plus grand stress. Ainsi, le risque que les fibres collagènes soient endommagées est accru.

Pour prévenir les courbatures, le moyen le plus efficace est de ne jamais faire un exercice d’une longue durée et/ou d’une grande intensité sans s’y être préalablement préparé par une progression lente et suffisamment longue du stress d’entraînement. Il faut que cette progression dans la charge d’entraînement soit encore plus douce et étalée sur une plus longue période si l’exercice qu’on pratique comporte un fort taux de contractions musculaires excentriques. La restauration de la  » charpente  » des fibres musculaires prend en effet un certain temps.

Plusieurs personnes croient qu’on peut s’épargner des courbatures à l’aide d’un échauffement, d’exercices d’étirement ou de massages effectués avant et/ou après l’activité. En dépit de certains autres effets bénéfiques de ces pratiques, les études portant sur cette question indiquent qu’elles n’ont pas d’effet sur les courbatures. Par contre, faire une autre activité que celle ayant occasionné les courbatures [par exemple, nager sans effort une vingtaine de minutes le lendemain d’une sortie de ski de fond particulièrement difficile] semble atténuer la douleur. En fait, cela augmente la pression sanguine dans les muscles endommagés sans les solliciter de manière trop ardue, ce qui réduit probablement l’œdème accompagnant l’inflammation.

À quelques reprises on a démontré qu’on ressent moins de courbatures en prenant — avant ou après l’effort — des anti-inflammatoires ou des analgésiques. Par contre, une courbature n’est pas une affection assez grave pour susciter une prescription de ce genre de médicaments. Plusieurs personnes font usage d’aspirine — dont les effets anti-inflammatoires et analgésiques sont connus — lorsqu’elles font une activité susceptible d’occasionner des courbatures, mais il faut rappeler que tout médicament a des effets secondaires et qu’il vaut toujours mieux s’en passer, lorsque cela est possible.

Novembre 1997


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